Ça vous place un bonhomme. Le 12 avril 2019, lors des 90 ans du FC Sochaux-Montbéliard, qui reçoit Le Havre, six portraits de 10 mètres par 15 sont étendus sur le pelouse du stade Auguste-Bonal, à Sochaux. Ils représentent six joueurs emblématiques de l’histoire du club, dont Claude Quittet, aux côtés, notamment, de Teddy Richert, Bernard Genghini ou encore Étienne Mattler.
L’enfant du pays, né à Mathay en 1941, a joué de 1958 à 1969 pour les jaunes et bleus. Avant de rejoindre l’OGC Nice en 1969 et de terminer sa carrière au Racing-club franc-comtois, à Besançon, de 1974 à 1976. C’est à cette époque que Thierry Mathey, l’auteur du livre, rencontre le joueur. « Je l’ai vu joué quand j’avais 9-10, au stade Léo-Lagrange, à Besançon », se souvient Thierry Mathey. « C’était le premier très grand joueur que je voyais à Besançon », ajoute l’auteur, conseiller principal d’éducation (CPE) dans un établissement scolaire de Dôle. « Ce que je retiens, c’est son élégance. On le comparait souvent à Franz Beckenbauer, même s’il n’a pas le formidable palmarès du joueur allemand. »
Jacquet, Larqué, Lemerre, Trésor…
Une élégance qu’il dégageait aussi en dehors des terrains. Et Thierry Mathey d’exhumer une anecdote : Claude Quittet a participé à un défilé de mode avant son départ pour le Sud, à la fin des années 1960, dans le pays de Montbéliard. En avril 1967, il reçoit l’oscar Byrrh, qui récompense chaque mois le meilleur joueur du championnat. Dans l’ouvrage Le Football-club Sochaux-Montbéliard en 90 dates, une photo de Claude Quittet posant avec son trophée confirme l’élégance du jeune homme, alors âgé de 26 ans. Celui qui a perdu deux finales de coupe de France (en 1967 avec Sochaux et en 1974 avec l’AS Monaco), dégage une certaine prestance.
En 18 ans de carrière (1958-1976), le défenseur a participé à 462 matchs, dont 16 matchs avec l’équipe de France. Il n’a récolté qu’un carton jaune et aucun carton rouge ; et son unique carton jaune, il le récolte lors de sa dernière sélection, à l’occasion d’une défaite contre l’URSS, en 1973, comme le rappelle le site Web de la fédération française de football (FFF). « Même sur les terrains, c’était un gentleman », observe Thierry Mathey. « Il faisait l’unanimité », poursuit-il, comme le prouvent les 134 témoignages d’acteurs du foot compilés dans l’ouvrage et qui lui rendent hommage. Aimé Jacquet, Roger Lemerre, Marius Trésor ou encore Jean-Michel Larqué. « Les plus connus côtoient les moins connus », note Thierry Mathey. Ça en dit long du charisme et du respect que suscite Claude Quittet. « C’était un joueur très apprécié dans le milieu. Personne n’a botté en touche ! »
Quand le nom d’Aimé Jacquet apparut…
Ces projets d’écriture sont de formidables aventures humaines. Intenses. Indéniablement, des faits marquants se détachent. Ce fut le cas quand il a échangé avec Aimé Jacquet. Un aimé Jacquet très discret dans les médias depuis la coupe du monde 1998 ; ses relations avec la presse ont été houleuses avant la compétition. Et l’homme en garde un souvenir tenu. Il n’accorde quasiment pas d’interviews. « Sa parole est rare », observe l’auteur. Il l’avait sollicité, au cas où… Alors, voir apparaître son numéro sur son portable, cela ne laisse pas indifférent confie Thierry Mathey. « C’était un grand moment. »
Claude Quittet, c’était aussi une grosse frappe. Qu’il a gardée. Le premier buteur en coupe du monde, Lucien Laurent, en a même fait les frais. Lors d’une rencontre amicale, à Besançon, Claude Quittet décoche une mine qui percute le poteau puis la tête de l’ancien buteur. « Ç’a été un peu la panique », raconte Thierry Mathey, qui relate l’histoire dans le livre. Un livre qui mêle autant les hommages, l’intime que les anecdotes, qui permettent ainsi de cerner une figure, « un bon vivant », sourit Thierry Mathey. Et de conter alors, la fois où, sur une plage de Salvador de Bahia, au Brésil, Claude Quittet a planqué les vêtements du sélectionneur de l’équipe de France, Georges Boulogne, « la veille du retour de l’équipe de France à Paris ».
« C’était la classe »
S’il n’a jamais été footballeur, Thierry Mathey reste fidèle à son club de cœur, en qualité de bénévole. Comme Claude Quittet, qui s’est installé à Besançon et qu’il croise parfois. Il se souvient notamment d’une dédicace du livre des 100 ans du club de Besançon, en 2004. L’ancien footballeur avait signé l’ouvrage de son père, alors malade. « Ce fut un moment important sur mon envie d’écrire sur lui. » Un acte fondateur. Près de 20 ans plus tard, l’idée s’est concrétisée. « C’était une formidable expérience humaine. J’ai découvert l’homme et je ne suis pas déçu », confie Thierry Mathey, qui a également une pensée affective pour l’épouse du joueur. « Elle connaît extrêmement bien le milieu du football », souligne l’auteur.
Le livre comprend enfin un long entretien de l’ancien international. 800 questions qui abordent sa vie, ses passions. Thierry Mathey ne pensait pas en poser autant. « Mais l’appétit vient en mangeant », remarque l’auteur. « C’est un ancien capitaine de l’équipe de France et il est extrêmement modeste, apprécie-t-il. Il sait d’où il vient. C’était un autre football et une autre mentalité. » Une image qui trace en miroir un portrait peu glorieux des mentalités actuelles du milieu, noyé dans le business. Des entretiens qui ont aussi permis de découvrir et de saisir l’homme qu’est Claude Quittet. « Et cet homme, c’est la simplicité, l’humilité », replace Thierry Mathey. Avant de conclure : « Claude Quittet, c’est la classe. »
- Claude Quittet, au stade des souvenirs et des hommages, 2022, éditions Cêtre, 28 euros. Séance de dédicaces de l’auteur et de Claude Quittet prévue au mois de novembre au musée de l’Aventure Peugeot, à Sochaux. Plus d’informations ici