Article rédigé par Atmo BFC, association en charge de la qualité de l’air – PARTENARIAT
L’Organisation météorologique mondiale (OMM), agence des Nations Unies, a publié le 5 septembre dernier son bulletin annuel sur la qualité de l’air et le climat. Le document met en lumière un phénomène de plus en plus préoccupant : les feux de forêt, de plus en plus fréquents et intenses avec le réchauffement climatique, libèrent un « mélange toxique » de polluants. Ces fumées ne restent pas confinées aux zones incendiées : elles se déplacent sur des milliers de kilomètres, impactant la qualité de l’air et la santé de millions de personnes à travers le monde !
En 2024, l’Europe du Sud, l’Amérique du Nord, l’Amazonie et la Sibérie ont été le théâtre de mégafeux dévastateurs. Ces incendies ont brûlé des milliers d’hectares, déplacé des populations et détruit des écosystèmes entiers. Mais leurs effets ne s’arrêtent pas là : les polluants qu’ils dégagent persistent dans l’atmosphère et sont transportés à grande échelle par les vents. L’OMM a ainsi observé des niveaux inhabituels de particules fines en Afrique centrale et en Europe, directement liés à ces incendies.
Le changement climatique, en favorisant la sécheresse et les vagues de chaleur, crée des conditions propices à ces feux et contribue à la dégradation de la qualité de l’air.
Les dangers invisibles des particules fines
Ces fumées contiennent notamment des particules microscopiques, les PM 2,5, dont le diamètre est inférieur à 2,5 micromètres. Trop petites pour être filtrées par nos voies respiratoires, elles pénètrent profondément dans les poumons et peuvent atteindre le système cardiovasculaire. De nombreuses études ont montré leur rôle dans le déclenchement de crises d’asthme, de bronchites chroniques ou de maladies cardiaques. À plus long terme, elles sont également associées à un risque accru de cancers et de troubles neurologiques.
Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), la pollution de l’air est aujourd’hui l’une des premières causes environnementales de mortalité, responsable de plus de 4,5 millions de décès prématurés chaque année dans le monde.
Des effets intercontinentaux et durables
L’OMM insiste sur le fait que la pollution issue des incendies n’a pas de frontières. En 2023 comme en 2024, les feux de forêt au Canada ont généré des fumées qui ont traversé l’Atlantique et contribué à dégrader l’air en Europe. Cette circulation intercontinentale démontre que personne n’est à l’abri. Par ailleurs, le bulletin souligne d’autres « points chauds » de pollution, comme la plaine indo-gangétique en Inde, où plus de 900 millions de personnes sont exposées à une pollution persistante. La combustion de résidus agricoles y favorise un brouillard hivernal dense et prolongé. Ce brouillard, autrefois considéré comme un simple phénomène saisonnier, reflète désormais l’empreinte croissante des activités humaines sur l’environnement.
En 2025 aussi, les fumées du Canada ont survolé la France !
Début juin 2025, le Canada a été confronté à une vague intense d’incendies de forêts. Ces feux massifs ont généré d’importants panaches de fumée qui ont traversé l’Atlantique pour atteindre la France. Portées par des conditions météorologiques favorables à leur transport, ces fumées ont stagné dans le sud-est du pays, où elles ont été observées jusque dans les vallées alpines, contribuant à une dégradation de la qualité de l’air.
Si la majorité des particules sont restées en altitude, certaines sont descendues vers les basses couches de l’atmosphère, entraînant localement une hausse des concentrations en particules fines (PM10), en particulier dans la journée du lundi 9 Juin et dans la nuit du 9 au 10 Juin. Les premières estimations de Prev’Air indiquaient un effet de l’ordre de 5 à 15 µg/m3 sur les concentrations de particules PM10 suite au passage de ce panache.
Quand l’action politique améliore l’air
Face à ce constat, l’OMM rappelle que des progrès sont possibles. Dans plusieurs régions du monde, des politiques publiques ambitieuses ont permis une nette amélioration de la qualité de l’air. En Chine, par exemple, des mesures strictes dans des grandes villes comme Pékin ou Shanghai ont conduit à une baisse importante des concentrations de particules fines en dix ans, grâce au développement massif du métro et au remplacement progressif des bus diesel par des bus électriques.
En Europe, des villes comme Paris ont instauré des zones à faibles émissions et multiplié les alternatives à la voiture individuelle, avec des résultats visibles sur les niveaux de dioxyde d’azote. Aux États-Unis, Los Angeles a investi dans le transport collectif et le renouvellement de sa flotte de bus, contribuant à réduire son célèbre « smog ». Ces exemples montrent qu’il est possible d’inverser la tendance, à condition d’agir de manière coordonnée et durable.
Le bulletin de l’OMM insiste enfin sur le fait que climat et qualité de l’air sont étroitement liés. Le réchauffement climatique intensifie les sécheresses et les vagues de chaleur, qui alimentent les incendies. Ces derniers, à leur tour, émettent d’énormes quantités de polluants qui menacent la santé humaine, les écosystèmes et l’économie. Pour l’OMM, il est essentiel de traiter conjointement ces deux enjeux afin de protéger durablement la planète et les populations.
Les bons gestes
L’activité humaine est très souvent responsable des départs de feux. En forêt, il est impératif de respecter certaines règles de prudence et de civisme avec la plus grande rigueur :
- Je n’utilise pas de feu en forêt
- Je ne fume pas en forêt, je ne jette pas mes mégots aux abords des forêts (ni tout autre débris incandescent)
- Je n’allume pas de barbecue à moins de 200 mètres d’une zone boisée
- Je ne brûle pas de déchets verts
- Je ne pratique pas de camping isolé ou de bivouac
- Je ne tire pas de feux d’artifices (publics ou privés) sur le territoire d’une commune forestière
- Je débroussaille mon jardin, surtout en été
- Je ne stocke pas de combustibles trop près de ma maison (bois, gaz, peinture, solvants ou citerne de fuel…)
En cas d’épisode de pollution, qu’il soit lié à un phénomène naturel (panaches volcaniques, feux de forêts, poussières sahariennes…) ou aux activités humaines :
- Il n’est pas nécessaire que je modifie mes habitudes
- En cas de symptômes ou d’inquiétude, je prends conseil auprès de mon médecin ou de mon pharmacien
- Je veille à ne pas aggraver les effets de cette pollution par d’autres facteurs irritants (tabac, usage de solvants en intérieur, chauffage au bois…)
- Je ne modifie pas mes pratiques habituelles d’aération et de ventilation
Pour les personnes sensibles et vulnérables (femmes enceintes, nourrissons, jeunes enfants, personnes de plus de 65 ans, personnes souffrant de pathologies cardiovasculaires, insuffisants cardiaques ou respiratoires, asthmatiques, personnes se reconnaissant comme sensibles lors des pics de pollution) :
- Je limite les déplacements sur les grands axes routiers et à leurs abords, aux heures de pointe
- J’évite toute activité sportive ou physique intense, en plein air comme à l’intérieur
- Je veille à ne pas aggraver les effets de cette pollution par d’autres facteurs irritants (usage de solvants sans protection appropriée, tabac…)
- Je respecte scrupuleusement ou adapte sur avis de mon médecin le traitement médical à visée respiratoire en cours…