Loéva Claverie
Sans une rencontre hasardeuse il y a six ans, Romain Vuillemey n’aurait probablement pas le curriculum sportif qu’il a aujourd’hui. Pour le jeune homme de 21 ans de Plancher-Bas (Haute-Saône), en situation de handicap moteur, tout s’est joué lors de la visite avec ses parents des portes ouvertes du lycée Denis-Diderot à Bavilliers, en 2019. Un professeur d’EPS vient à sa rencontre pour lui proposer de faire un essai de boxe en fauteuil. Après une heure, Romain est conquis.
S’ensuivent alors plusieurs années d’entraînement. « Mon professeur avait le projet de m’emmener au championnat UNSS [Union nationale du sport scolaire, NDLR] de France de boxe, mais ça a été plusieurs fois annulé à cause du Covid, relate Romain. Puis, le 1er mars 2023, j’ai remporté le championnat inter-régional, avec deux combats, deux victoires. » Avec ses deux victoires supplémentaires remportées en 2022, Romain est certain qu’il va être sélectionné pour concourir au championnat de France de boxe UNSS à Blois (Loir-et-Cher). C’était sans compter la réticence de l’UNSS nationale. « Au début, elle ne voulait pas trop d’handis dans leur championnat. Mon coach et le directeur régional de l’UNSS en ont été sidérés. »
Romain et son ami Amine finissent par y aller « pour faire quelques combats », mais l’UNSS leur annonce qu’elle ne leur décernera pas de titre. « En deux jours, on a respectivement fait huit et sept combats. Et l’UNSS était en fait admirative, ils nous ont fait des excuses et nous ont donné le titre de champion de France de boxe UNSS. »
« On ne veut pas reconnaître le handicap »
De là, Romain Vuillemey continue la boxe en club à Belfort et explore d’autres disciplines. Il remporte la coupe de France de para-karaté contact en 2024. Un sport également découvert « par hasard » et une réussite saluée par sa nomination en tant que « sportif du mois de mars par l’Actu Sport de Montbéliard ».
Dix kilomètres du Lion, montée du Salbert, dix kilomètres de Belfort… Depuis deux ans, Romain multiplie également les courses en fauteuil ; et tous ses engagements sportifs lui ont valu de recevoir « un trophée de l’office municipal des sports à Belfort dans la catégorie sports scolaires et un autre début juin à Bethoncourt ».
 côté de ça, le jeune homme est actuellement en pleine recherche d’emploi. Diplômé en 2023 d’un bac pro informatique, il ne parvient cependant pas à trouver un poste dans sa branche. Les offres auxquelles il a postulé jusqu’alors lui sont toutes revenues avec un refus. « C’est ça le problème qu’il y a en France, déplore-t-il. On ne veut pas reconnaître le handicap et on ne veut pas embaucher une personne en situation de handicap. C’est très regrettable. » Ayant tout juste fini son service civique chez France Travail, il recherche actuellement en tant qu’agent d’accueil ainsi que dans sa branche informatique.
Frame running aux paralympiques
Un manque d’ouverture d’esprit autour du handicap que Romain a déjà vécu aussi dans le sport : son expérience au championnat de boxe, des logements pas aménagés lors de compétitions dans d’autres villes… Et malgré les Jeux paralympiques à Paris l’année dernière, l’engouement qu’ils avaient suscité autour du handisport est vite retombé. « Il y a deux semaines, j’ai été au championnat de France d’athlétisme handisport à Belfort en tant que spectateur. Il n’y avait personne dans les tribunes. »
Romain voit alors dans ses aventures sportives l’occasion de changer les mentalités « des valides », et communique pour cela sur son compte Facebook. « Le fait de ne pouvoir rien faire quand on est en situation de handicap est un cliché », regrette-t-il. Il cite pour exemple le sportif Philippe Croizon, amputé des quatre membres. « Je l’admire beaucoup. Le fait de voir que quelqu’un qui a un handicap plus lourd que moi peut s’en sortir est une grande motivation. »
Alors Romain Vuillemey continue ses entraînements, ses compétitions, ses courses et ne s’arrête pas. Le dépassement de soi et les rencontres sont devenus ses moteurs. « On rencontre dans le handisport des gens qui ont la même mentalité que nous, qui veulent favoriser l’inclusion. Ça permet de tisser des liens avec d’autres personnes et de voyager. »
Encouragés par les personnes du comité paralympiques, Romain Vuillemey va entamer à la rentrée un entraînement de frame running. Une nouvelle discipline d’athlétisme qui arrive aux Jeux paralympiques et qui consiste à courir en s’aidant d’un tricycle. S’il va continuer les compétitions diverses dès septembre, l’objectif de Romain Vuillemey pour les prochaines années n’est qu’un : participer aux Jeux paralympiques.
