« Si on donne plus au privé, on donne moins au public », s’indigne Benoît Guyon, professeur de sciences économiques et sociales (SES) au lycée Courbet, à Belfort, représentant du syndicat d’enseignant Snes-FSU. Il rebondit sur une enquête de France Info, en collaboration avec Compléments d’enquête, dévoilant des inégalités de financements entre établissements privés et publics ; en jeu, la dotation horaire globale (DHG), qui entraine « de meilleurs conditions d’enseignement que le public », indique France info. « C’est un système très contestable », poursuit le représentant syndical.
« Cela fait plusieurs années que nous demandons une transparence sur ces chiffres », regrette Benoit Guyon. L’enquête nationale permet de confirmer leurs inquiétudes. Il y a bien un écart de dotation horaires par élève entre lycées privés et publics. « Quand on travaille les dotations avec le rectorat, on a une sorte de progressivité, selon les publics », explique-t-il. Elle disparaît quand on observe les données dévoilées par France Info.
« [Le lycée] Sainte-Marie est mieux financé que [les lycées] Courbet et Condorcet, avec également un avantage de 3 élèves de moins par heure de cours en moyenne », écrit-il dans une analyse publiée sur le site Internet du syndicat, qui s’oppose à ce système. « Les classes du lycée Sainte-Marie accueillent [pourtant] les élèves parmi les plus favorisés de la région (indice de positionnement social à 140, quand la moyenne est de 100) et un public moins hétérogène, observe Benoît Guyon, avant de poursuivre : Pour Notre-Dame-des-Anges, l’origine sociale des élèves est comparable aux lycées Courbet et Condorcet (IPS autour de 110), même si ces deux lycées publics ont des classes plus hétérogènes. À l’inverse, le lycée Follereau (voie GT) doit composer avec un public moins favorisé socialement (IPS autour de 100). » D’estimer : « Normalement, on donne plus d’heures à ceux qui en ont plus besoin. Là, on fait le contraire. »
Le rectorat évoque la taille des établissements
Il dénonce des financements publics à l’adresse d’établissements qui font « un tri » des élèves, alors que « nous, on accueille sans distinction ». « Si le rectorat répartissait plus équitablement les dotations, par exemple en alignant Courbet et Condorcet sur Sainte-Marie, cela se traduirait par une augmentation de 120 heures de cours hebdomadaires pour les lycées publics ! Avec, à la clé, des heures en demi-groupes, moins d’élèves par classe, plus d’options », observe Benoît Guyon, dans sa réflexion.
« Les critères de dotations des établissements privés sous contrat sont conformes au modèle du public avec une allocation progressive des moyens prenant en compte l’éloignement, l’indice de position sociale, les élèves boursiers, les résultats aux évaluations nationales », répond le rectorat, sollicité sur ce dossier ; il précise par ailleurs que les programmes sont les mêmes dans le public et le privé sous contrat. Et d’indiquer : « La seule différence consiste pour le privé sous contrat à allouer une DGH incluant les heures d’enseignants mais aussi de documentalistes et de chefs de travaux (DDFPT). »
Le rectorat conteste « une politique de financement académique plus favorable à l’enseignement privé ». Selon lui, la différence résulte de la taille des huit lycées du département ; six ont des effectifs pré-bac inférieur à 500 élèves. « Le financement réglementaire étant à la structure et non au nombre d’élèves, [l’indicateur heures d’enseignement par élève] est élevé lorsque le nombre d’élèves est faible », justifie le rectorat, par mail. Celui-ci indique également que cet indicateur est, en collège, un peu inférieur dans le privé par rapport au public. Et il est beaucoup plus favorable au public dans les lycées professionnels note-t-il.
Les dotations 2025 seront présentées en janvier 2025, indique Benoît Guyon. « Nous attendons de la transparence », prévient-il. « C’est scandaleux d’attendre une enquête journalistique pour avoir un état des lieux de l’argent public », poursuit le représentant syndical.