Après cinq heures de débat et le départ de presque (mais presque seulement) la moitié des élus, Pays de Montbéliard Agglomération (PMA) a choisi ce jeudi 12 décembre, d’avoir recours à une délégation de service public (DSP) comme mode de gestion de son réseau d’eau et d’assainissement. Et Véolia est le seul candidat.
Après cinq heures de débat et le départ de presque (mais presque seulement) la moitié des élus, Pays de Montbéliard Agglomération (PMA) a choisi ce jeudi 12 décembre, d’avoir recours à une délégation de service public (DSP) comme mode de gestion de son réseau d’eau et d’assainissement. Et Véolia est le seul candidat.
Il aura fallu attendre 23 h 20 pour que Charles Demouge, président de PMA, passe au vote, après un débat de presque cinq heures. Un vote auquel n’ont pris part que 66 conseillers, les autres préférant quitter la salle pour ne pas cautionner la démarche. Mais le quorum de 57 votants restait atteint.
Résultat : 62 votes favorables à la délégation de service public (DSP) plutôt qu’à la régie et 4 voix contre. Et Véolia étant la seule entreprise à s’être positionnée sur ce marché, c’est donc à elle que reviendra, pour au moins dix ans, la gestion du réseau d’eau et de l’assainissement pour les 72 communes de PMA.
Pour en arriver là, les élus auront ferraillé pendant presque cinq heures. L’ouverture des débats avait déjà été fortement retardée par la volonté de filtrer le public à l’entrée des locaux de PMA, en raison d’une manifestation d’opposants à la DSP. Il fallait montrer patte blanche pour rentrer dans l’enceinte des débats et le gros du public a été placé dans le hall du bâtiment, face à un écran géant.
Le prix face à l’objectivité
Charles Demouge a finalement ouvert la séance vers 18 h 45 et a d’emblée choisi de donner une certaine solennité à la soirée en affirmant l’importance de la décision qui devait être prise. Après avoir développé les arguments déjà évoqués en conférence de presse le matin en réponse à ses opposants, il a annoncé qu’il modifiait l’ordre des points devant être abordés pour commencer par le dossier de l’eau. Il a aussi annoncé qu’il demanderait un « vote public » ; une procédure où chaque élu serait appelé un à un et invité à énoncer à haute voix son vote, favorable ou non. Et il a indiqué qu’il prendrait tout le temps nécessaire pour que chacun puisse s’exprimer et avoir des réponses. Les élus ne s’en sont pas privés, quel que soit leur point de vue, quitte à émettre de nombreuses redites : on ne compte plus les interventions.
Parmi ceux qui se sont montrés favorables à la DSP, deux arguments ont particulièrement porté : celui du prix de l’eau, présenté comme plus bas en DSP qu’en régie, et celui de la continuité du service, notamment en cas d’incidents. Il faut dire que l’étude présentée par un cabinet d’experts était totalement en faveur de la DSP. Le sénateur socialiste Martial Bourquin et le député En Marche Denis Sommer n’ont pas manqué de s’en étonner et de dénoncer une absence totale d’objectivité du rapport et des scénarios retenus pour établir les chiffres.
Martial Bourquin s’est même autorisé à remettre en cause son indépendance vis-à-vis de Véolia, en affirmant que deux procédures judiciaires étaient en cours pour cette raison ; ces procédures n’ayant pas encore débouché sur un jugement, le cabinet est donc réputé innocent jusqu’à ce jour.
Question de méthode
Les opposants – Denis Sommer, Martial Bourquin en tête – ont réclamé une étude de France Eau Régie pour contrebalancer l’étude présentée aux élus ce jeudi soir. Et Martial Bourquin de citer avec malice Christian Estrosi, maire de Nice, du même parti que Charles Demouge, comme exemple de grande collectivité qui a opté pour la régie. Avant lui, Philippe Claudel (Étupes) avait ironisé sur la présentation de l’étude : « Je suis rassuré et soulagé : une entreprise privée vient perdre de l’argent à notre place ! Après une telle démonstration, quel élu pourrait ne pas voter la DSP ! »
Jean Fried, chef de file du groupe des Indépendants et solidaires, a renouvelé ses réserves à la fois envers la méthode adoptée, le cahier des charges et les résultats de l’étude. « Le choix aujourd’hui, c’est DSP ou pas ; c’est un choix intenable », a-t-il affirmé, avant d’annoncer qu’il ne participerait pas au vote pour ne pas lui donner de crédit.
Le débat s’est poursuivi sur la même tonalité durant toute la soirée, Charles Demouge balayant tous les reproches aussi bien sur la concertation, sur les risques d’illégalité avec pour principal argument le prix annoncé pour l’usager et le travail mené durant deux ans avec l’approbation (au moins formelle) de l’assemblée.
Il aura fallu une attaque de Christophe Froppier à l’encontre de Jean Fried sur sa façon dont il assume sa délégation sur l’enseignement musical pour que les opposants quittent la salle. Et pour que le vote se déroule. De guerre lasse.
Le coût de l'absentéisme présumé [billet]
L’argument de l’absentéisme, supposé ou réel, des fonctionnaires travaillant au sein d’une régie peut-il être un paramètre à prendre en compte dans le calcul prévisionnel du prix de l’eau ?
Oui ! Du moins si l’on en croit le cabinet qui a livré son étude sur le mode de gestion de l’eau et de l’assainissement. Et ceci a joué en défaveur de l’éventualité d’une régie, puisque le taux d’absentéisme avancé est de 15 %, ce qui génère des surcoûts en salaires pour assurer les remplacements et le niveau de service. Bien des élus (essentiellement de sensibilité de gauche) en ont été estomaqués. Il est vrai que c’est du rarement, pour ne pas dire du jamais-vu. On imagine que s’il existe des statistiques sur le nombre de parturientes parmi les fonctionnaires, le risque de surcoût lié aux absences pourra désormais être utilisé. À ceux qui opposeront l’égalité homme / femme, on répliquera avec une statistique sur le nombre de jeunes papas qui n’hésitent plus à prendre leur congé de paternité pour aider les mamans. Et puis, peut-être en viendra-t-on un jour à intégrer l’âge moyen et les risques de maladie liés à l’âge, les taux de grévistes et que sais-je encore. « La ficelle est tellement grosse que c’est une corde », image même un élu.