« Christian, Christian, Christian ». Devant le tribunal judiciaire de Montbéliard, une soixante de personnes scande le nom de celui qui est convoqué, ce vendredi 23 juin, au tribunal judiciaire de Montbéliard. Il est visé par une procédure de composition pénale. Une procédure utilisée pour des faits de faible gravité où le délégué du procureur propose une ou plusieurs sanctions qui doivent « réparer le préjudice ».
S’il est ici aujourd’hui, c’est parce que la députée du Rassemblement National de la 4e circonscription du Doubs, Géraldine Grangier, l’accuse de l’avoir « outragé » en utilisant le terme « facho » (lire notre article). Un terme qu’il défend. « Il en va de ma liberté d’expression, celle de tous. Ce n’est pas une insulte mais un qualificatif politique », expliquait-il déjà il y a quelques semaines. À 9h40, quelques minutes avant cette convocation, une pointe d’appréhension se lit sur son visage. « C’est la première fois de ma vie que je suis convoqué au tribunal en 65 ans », explique Christian qui affirme déjà : « Peu importe la peine que l’on me proposera, je la refuserai. J’assume le terme employé ce jour-là. Avec l’assemblée citoyenne, nous sommes tous d’accord. » Se passant la main dans les cheveux, il salue ses amis et soutiens avant de rentrer dans le tribunal judiciaire, où il va être défendu par l’avocat Arié Alimi.
Petit-déjeuner, discours, les manifestants ont prévu des occupations pour patienter jusqu’à son retour. « C’est un parti qui a pour marque de fabrique de dire que les hommes ne sont pas égaux. Nous sommes en droit de le dire. Et revenons en arrière : qui a fondé le RN ? » Mathilde Regnaud, attachée parlementaire du député La France Insoumise du Territoire de Belfort, Florian Chauche, et membre de l’assemblée citoyenne, nomme plusieurs fondateurs du parti anciennement Front National. « Pierre Bousquet, fasciste ayant participé à la résistance nazi au sein de la Waffen-SS, Victor Barthélémy, fasciste. Il y en a énormément d’autres mais je ne voudrais pas être trop longue. Alors oui, nous sommes en droit de dire que le RN a des origines fascistes. »
Evelyne Petit, présidente de la Ligue des droits de l’homme 90, prend la suite. « Nous sommes au côté de Christian Milliet. Nous sommes dans une époque de contestation des organisations syndicales, dans une crise démocratique profonde où la défense des libertés est un sujet des plus complexes. » Elle revient sur l’attaque au couteau qui s’est produite à Annecy le 8 juin dernier.« Ce fait-divers a été utilisé par le RN. Ils ont manifesté en écrivant sur des pancartes « Migrants assassins », mais là, il n’y a pas eu de rappel à la loi. » Elle est interrompue par les applaudissements de tous.
Un stage de citoyenneté
Ce n’est que vers 11h que Christian revient devant le tribunal auprès de la soixante de personnes qui sont restées sous un soleil de plomb pour l’attendre. « J’ai été aux côtés des salariés de Lipp, à Besançon, quand j’avais 15 ans. C’est ici qu’est née ma conscience de classe. Et aujourd’hui, on me propose quelque chose d’aberrant. Un stage de citoyenneté au sein de l’association Léo Lagrange, qu’on me demande de payer 150 euros. » Il rit jaune.
« Je ne vais pas jouer les héros parce que j’ai refusé mais cela fait partie d’un ensemble, il ne faut rien lâcher. » Pour lui, avoir refusé cette sanction est « un combat collectif, un combat d’idée » qui doit continuer, et qui doit être nourri plus intensément pour lutter contre « des positions radicalement différentes ». Plus tard, il affirme en marge du rassemblement : « J’ai mon permis de conduire. Je m’arrête au feu. Je dis bonjour aux dames, aux messieurs. Je dis merci. Qu’on ne me parle pas de stage de citoyenneté », plaisante-t-il. Il souffle : « Vous savez, ça me touche quand même.» En refusant, le délégué du procureur lui a signifié que l’étape suivante pouvait être le renvoi devant le tribunal correctionnel. Pour le moment, rien n’est sûr. Par mail, son avocat du barreau parisien Arié Alimi explique que le tribunal correctionnel n’est pas forcément la prochaine étape. « Tout va dépendre de la décision du parquet. Nous devons attendre les suites », explique-t-il. S’il est renvoyé en correctionnel, Christian continuera d’être défendu par Arié Alimi, affirme-t-il par téléphone dans l’après-midi.