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Maude Clavequin : « Avec le campus, on crée un écosystème pour être attractif et accueillir »

L’enseignement supérieur va se penser à l’échelle du nord Franche-Comté. Un partenariat a été tissé entre collectivités et établissements d’enseignement supérieur pour construire un pôle de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.

L’enseignement supérieur va se penser à l’échelle du nord Franche-Comté. Un partenariat a été tissé entre collectivités et établissements d’enseignement supérieur pour construire un pôle de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Maude Clavequin, vice-présidente de la Région Bourgogne-Franche-Comté, dresse les grands principes de ce campus Nord-Franche-Comté. Entretien.

Comment est organisé l’enseignement supérieur dans la région Bourgogne-Franche-Comté ?

Contrairement à Strasbourg ou d’autres métropoles, l’université Bourgogne-Franche-Comté n’est pas centralisée. Dans la région, nous avons 13 sites territorialisés. Nous y tenons car cela permet de développer une vie étudiante dans les territoires ; c’est important en termes d’attractivité. Nous voulons aussi démocratiser les conditions d’accès à l’enseignement supérieur. La proximité du domicile en est un. En parallèle, nous avons quatre grands pôles universitaires : Dijon, Sud-Bourgogne, Besançon et Nord-Franche-Comté.

L’éparpillement n’est-il pas un risque ?

Ce qui peut paraître comme une faiblesse, nous en faisons une force. Même avec la fusion des Régions, il n’y a pas eu de concurrences entre les sites, car il y avait une diversité. C’est une chance. En février 2018, nous avons créé la communauté d’universités et d’établissements Université Bourgogne-Franche-Comté. C’est une instance fédérale, une sorte d’intercommunalités des établissements d’enseignement supérieur, qui devrait avoir de plus en plus de compétences. Mais pour que cette logique soit la bonne, il faut connecter les 4 pôles, qui portent l’excellence de la recherche, aux territoires et à ses besoins. Ce sont les campus. Dans la région, il ne restait plus que le campus Nord-Franche-Comté à réaliser. Mercredi, nous avons signé un partenariat pour le mettre en place.

Huit acteurs du nord Franche-Comté

Le nord Franche-Comté accueille 3 000 étudiants à l’UTBM, 3 100 étudiants et stagiaires à l’université de Franche-Comté (IUT Belfort-Montbéliard, UFR STGI, école supérieure du professorat et de l’éducation), 250 étudiants à l’école supérieure des technologies et des affaires (Esta), 700 étudiants à l’école d’infirmière, ainsi qu’entre 350 et 450 apprentis techniciens supérieurs ou ingénieurs du CFA industriel. Il y a également 250 enseignants-chercheurs. Huit membres composent ce campus : la Région Bourgogne-Franche-Comté, le Pôle métropolitain Nord-Franche-Comté, Pays de Montbéliard Agglomération, le Grand Belfort, l’université de Franche-Comté, l’université de technologie Belfort-Montbéliard (UTBM), ainsi que l’école supérieure des technologies et des affaires (UTBM). À ces acteurs sont associés des partenaires, comme la Vallée de l’Énergie, Numerica ou encore le Pôle Véhicule du Futur. Il s’intéresse notamment à trois axes : énergie et transports-mobilité ; numérique ; et les sciences et technologies de l’information et de la communication. Le nord Franche-Comté est un bassin de 117 500 emplois. On y trouve également 754 logements étudiants en résidences Crous, trois restaurants universitaires et quatre bibliothèques universitaires à Belfort (deux), Sevenans et Montbéliard.

Qu’est-ce qu’un campus ? Quels sont ses objectifs ?

Un campus est une structure qui regroupe tous les acteurs d’un territoire – les établissements d’enseignements supérieurs, les acteurs économiques et les collectivités – pour travailler à l’attractivité du territoire et relever les défis qui nous attendent.  Son idée n’est pas de contraindre. C’est une instance collaborative, portée par le Pôle métropolitain Nord-Franche-Comté ; nous allons recruter une personne pour animer le réseau. Les objectifs de ce campus sont multiples : augmenter le nombre d’étudiants ; proposer un écosystème local qui permet d’accueillir et d’attirer ; conserver dans le territoire les meilleurs étudiants pour créer à terme de l’activité économique. Je ne comprends pas, par exemple, comment un territoire de 320 000 habitants (317 528 habitants exactement, population légale au 1er janvier 2019) n’ait que 7 500 étudiants !

Vous souhaitez un écosystème agile. C’est-à-dire ?

À Shenzhen (Chine*), par exemple, les étudiants trouvent tout sur place, notamment les composants électroniques dont ils ont besoin pour concevoir les produits. L’économie de l’innovation chinoise ne fonctionne pas comme ici. Ils vont très vite du prototype à la commercialisation. Et les premières ventes servent à financer les améliorations. Au bout de 3 ans, le produit est mûr, mais il a déjà été vendu 3 ou 4 fois. Ils ont tout le continuum, de l’idée du projet à sa commercialisation. 

Notre idée, avec le campus, c’est de permettre aux étudiants de tout trouver sur place ; que ceux qui créent une activité économique puissent le faire ici. On renforce ainsi l’attractivité des formations en valorisant l’écosystème et les débouchés. On doit créer un cercle vertueux. Le campus peut permettre, par exemple, de trouver des solutions pour faire venir rapidement et facilement des composants, de trouver des investisseurs ou de favoriser des campagnes de crownfounding.

"Je ne comprends pas comment un territoire de 320 000 habitants n'ait que 7 500 étudiants !"
Maude Clavequin
vice-présidente de la région BFC

On évoque régulièrement le dossier de l’hydrogène. Le campus peut-il le porter ?

Sur la partie hydrogène, le nord Franche-Comté dispose d’un écosystème incroyable. Le territoire a fait le pari, il y a 20 ans, que c’était une solution d’avenir. Aujourd’hui, on y est. Et c’est construit autour du FC LAB, installé au Techn’Hom. Le traiter à l’échelle du campus permet d’informer l’ensemble des acteurs du territoire et de les mettre en lien. Ensuite, il faut que les collectivités montrent ces savoir-faire dans leurs choix de politiques publiques, en achetant par exemple des bus fonctionnant à l’hydrogène. Le fait que les collectivités s’engagent, c’est un signe de confiance. C’est aussi montrer que nous avons un territoire innovant qui se diversifie. Au-delà de la recherche, on pourra faire évoluer les formations ou les renforcer en fonction des besoins.

"L’avenir de Belfort passe par celui de Montbéliard, qui passe par celui d’Héricourt. Notre avenir est à l’échelle du nord Franche-Comté et nous sommes interconnectés."
Maude Clavequin
vice-présidente de la région BFC

Est-ce une pierre supplémentaire pour penser le nord Franche-Comté ?

Dans un monde qui bouge très vite, il faut être réactif. Le campus permet d’avoir un lieu qui suit les dossiers, où l’on travaille ensemble. Dans cette logique, il n’y a pas de concurrence entre les territoires. L’avenir de Belfort passe par celui de Montbéliard, qui passe par celui d’Héricourt. Notre avenir est à l’échelle du nord Franche-Comté et nous sommes interconnectés. En termes administratifs, notre territoire ne répond pas à ces enjeux. J’en suis convaincu depuis longtemps, mais nous sommes dorénavant dans une situation d’urgence. Il nous faut une structuration métropolitaine à l’échelle du nord Franche-Comté, à l’image de la métropole lyonnaise.

* Des liens forts existent entre le nord Franche-Comté et la Chine dans le domaine de l’enseignement supérieur. Depuis 2005 existe l’UTSEUS, un institut sino-français en ingénierie, commun aux universités de technologie de Belfort-Montbéliard, Compiègne et Troyes et à l’université de Shanghai (SHU).

 

L'éco-campus, des bâtiments à l’image du territoire

En parallèle de la mise en place de ce campus, un programme de restauration des bâtiments universitaires, nommé éco-campus, est lancé. « Il vise à être un modèle de transformation de sites universitaires », confie Maude Clavequin. À terme, il doit notamment regrouper en trois bâtiments, les cinq sites belfortains : sciences au Techn’Hom ; sciences de l’éducation sur le site Marc-Bloch ; et économie-gestion-droit au bâtiment Néel en vieille-ville. Le coût total s’élève à près de 45 millions d’euros. La première phase concerne le site du Techn’Hom, pour un montant de 34,18 millions d’euros. Au cours de cette première phase, on va construire le bâtiment énergie, de 18,75 millions d’euros et dont la Région en finance 12,85 millions. « Le bâtiment doit mettre en avant les compétences du territoire, note Maude Clavequin. C’est une vitrine en termes d’excellence de formation, de recherches et de savoir-faire industriels. » Des showroom seront installés et les étudiants devraient être immergés dans les laboratoires dès la L1. Il n’est pas annoncé avant 2024.

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