Le Territoire de Belfort est marqué par un phénomène : le vieillissement de la population. Cela a des conséquences directes sur les métiers de l’aide à domicile. En témoigne Amaelles, collectif d’aide et soins à la personne dans le Territoire de Belfort. Depuis 2013, Audrey Gagliano, chargée de recrutement et de formation pour le collectif, observe les défis grandissants dans le secteur des soins à domicile : « De plus en plus de personnes souhaitent rester chez elles malgré une dépendance croissante. Le domicile est désormais le choix numéro un des patients », note- t-elle.
Cela nécessite une offre de soins à domicile plus importante, avec des soins plus longs et plus de prestations. La saturation des Ehpad, qui ne peuvent plus accueillir tout le monde, ajoute à cela une patientèle supplémentaire, habituellement accueillie dans ce type de structure. Les besoins s’accroissent aussi du fait de l’évolution des pathologies. Amaelles est de plus en plus sollicitée pour des soins auprès de personnes plus jeunes, atteintes de cancer, souffrant de troubles psychiatriques, ou nécessitant un accompagnement en fin de vie. « Depuis cinq ans, ces demandes se multiplient », constate Audrey Gagliano.
Le collectif recrute deux types de professionnels pour accompagner cette demande : des aides-soignantes diplômées d’État et des aides à domicile, un métier qui ne nécessite pas de diplôme, mais demande un engagement important (accompagnement de la personne, courses, prise des repas, entretien du domicile). Ces deux professions, essentielles pour le maintien à domicile des personnes âgées ou dépendantes, peinent pourtant à attirer des candidats sérieux, relève la professionnelle.
Un métier exigeant
En dix ans, les difficultés liées au recrutement se sont largement intensifiées. « Les CV arrivent toujours, mais les profils ne correspondent souvent pas aux exigences en termes d’horaires ou de flexibilité », explique Audrey Gagliano. La crise sanitaire liée au covid-19 a amplifié cette tendance. « Au début de la pandémie, il y avait une vague de personnes désireuses d’aider, mais cet élan s’est vite essoufflé », constate-t-elle.
Depuis, le secteur souffre d’un manque croissant de candidatures sérieuses. Le métier d’aide-soignante, en particulier, est jugé exigeant. « C’est un travail où l’on est au service des autresen permanence, souvent à toute heure », souligne la responsable du recrutement. Audrey Gagliano et Angélique Barrocas, directrice des interventions chez Amaelles, soulignent aussi une concurrence accrue sur le marché de l’emploi. « Tous les secteurs recrutent, ce qui n’est pas en notre faveur », reconnaît Audrey. La proximité avec la Suisse accentue encore cette pénurie de main-d’œuvre, les salaires plus attractifs de l’autre côté de la frontière détournant les candidats potentiels.
Des initiatives pour attirer et fidéliser
Amaelles, qui compte actuellement 416 salariés, dont 37 aides-soignantes et 340 aides à domicile, multiplie les efforts pour fidéliser son personnel. « Nous avons dû adapter nos pratiques, en proposant des horaires plus flexibles et davantage de temps partiel pour permettre à nos employés de mieux concilier vie privée et vie professionnelle », explique Angélique Berrocas. Diverses primes ont été mises en place : prime de cooptation, prime d’assiduité, prime de complexité, ou encore des primes pour les remplacements en urgence.
« Mais cela n’a pas suffi à inverser la tendance », admettent les deux responsables. Pour tenter de pallier le manque de personnel, Amaelles propose également des formations internes. Par exemple, une aide à domicile peut évoluer vers le métier d’aide-soignante en suivant une formation en partenariat avec l’IFMS, entièrement prise en charge par l’association. Amaelles a aussi investi dans 25 voitures, dont des véhicules électriques sans permis, pour faciliter les déplacements de ses employés et limiter l’usage de leurs voitures personnelles.
Malgré ces initiatives, Amaelles manque actuellement d’une quinzaine de personnes, dont trois à quatre aides-soignantes et une dizaine d’aides à domicile. « Le recrutement ne permet pour l’instant que de compenser les absences et le turn-over », regrette Angélique. Durant l’été 2024, Amaelles a lancé plusieurs campagnes de communication, avec des affiches publicitaires en 4 mètres par 3 dans tout le Territoire de Belfort.
Ces campagnes, bien qu’ambitieuses, n’ont pas encore produit les résultats escomptés. « L’investissement n’a pas eu les retombées attendues », admet Audrey, qui rapporte n’avoir reçu que quelques appels en réponse à ces initiatives. Mais l’association continue tout de même à promouvoir l’activité, en multipliant les actions de promotion des métiers du service à la personne. Aux caisses des magasins, à la radio, sur des sets de table, Amaelles cherche à se faire voir partout via de la publicité, avec l’espoir de recruter…et de fidéliser.
Article issu de notre magazine « Les défis du recrutement ». Disponible en kiosque numérique ici.