Régulièrement, treize infirmières et aides-soignantes ainsi que cinq médecins, tous ayant fait valoir leurs droits à la retraite, assurent des remplacements à l’hôpital Nord Franche-Comté. Dix autres le font plus ponctuellement. Ils le font dans le cadre du dispositif cumul emploi-retraite. Selon son site Web, l’hôpital Nord Franche-Comté compte 3 705 personnels, dont 455 médecins, internes ou attachés, ainsi que 3 250 personnels non médicaux (soignants, médico-techniques, administratifs, logistiques…)
« Je fais enfin ce que j’aime », sourit le docteur Sylviane Rossière, radiologue. Depuis 4 ans, malgré la retraite, elle remet la blouse blanche. Elle a toujours fait ce qu’elle aimait, elle qui compte 45 ans de service à l’hôpital local. À travers cette remarque, elle souligne qu’elle est aujourd’hui déchargée des tâches administrative qui était liée à sa fonction de chef de service. Elle peut se concentrer sur ce qu’elle aime et notamment la sénologie. Ce confort du choix et de la liberté, Patricia Peugeot le confirme. Quand elle veut ou peut travailler, elle consulte un serveur répertoriant les besoins des services. Elle apprécie particulièrement la diversité des propositions, permettant de découvrir des services. « On va où on veut et on fait comme on veut. » Camille Rombaut, directrice adjointe des ressources humaines, d’ajouter : « Cela se fait à la carte. »
En début d’année, la possibilité de recourir à ce dispositif a été allongé jusqu’à l’âge limite de 72 ans, contre 67 ans auparavant. Dès le début de sa retraite, on peut s’inscrire dans ce dispositif. L’hôpital met en garde : il n’y a pas de délai de carence de six mois avant de prétendre à ce dispositif. Un dispositif peu « connu » des agents convient Camille Rombaut.
Pallier le manque de personnel
« Ça me permet d’arrêter progressivement », remarque, pour sa part, Brigitte Kunding, infirmière, dont la fin de carrière a été difficile. La succession de crises, le fait de devoir passer d’un service à un autre sans préavis, a été une « souffrance ». Elle a dû arrêter précipitamment, « dans la douleur », convient-elle. Mais ce dispositif de cumul emploi-retraite lui permet aussi d’exercer un métier auquel elle est très attachée. Qui plus est à l’hôpital. Tel un sacerdoce. « Je suis foncièrement infirmière hospitalière », ajoute celle qui travaillait en gériatrie, auprès de personnes souffrant de troubles cognitifs. Elle opte pour l’hôpital, alors même qu’elle a été démarchée par des maisons de retraite, dès sa retraite. « Je ne suis pas dans une situation où je dois remplacer en urgence », confirme-t-elle. « On s’adapte à leur nouveau mode de vie », confirme la directrice adjointe en charge des ressources humaines. « Et je continue de transmettre », apprécie également le docteur Sylviane Rossière.
Travailler permet aussi de faire face aux charges de la famille, alors que le contexte est à l’inflation. Karine Demesy-Nycs, coordinatrice générale des soins de l’hôpital Nord Franche-Comté, relève aussi que le passage à la retraite des agents hospitaliers peut entraîner « une perte de revenu considérable ». Une grande partie des revenus des agents est en effet composée de primes, non prises en compte dans le calcul de la pension de retraite. Ce dispositif permet ainsi de faire baisser « progressivement » les revenus.
Ce dispositif était utilisé ces dernières années dans des services où le recrutement était déjà en tension, comme chez les anesthésistes ou chez les spécialistes du bloc opératoire. Mais les besoins se généralisent, les profils aussi. « On a de grandes difficultés à recruter », convient Karine Demesy-Nycs. Ce contexte « de pénurie de personnels médicaux et non-médicaux » oblige donc à informer d’avantage le personnel de l’existence de ce dispositif du cumul emploi-retraite. C’est une des pistes étudiées pour pallier le déficit de personnel, au même titre que le travail sur la fidélisation ou l’attractivité. Les néo-retraités, de leurs côtés, ont aussi le sentiment du devoir accompli. « On participe à l’effort collectif », soulignent Brigitte, Sylviane et Patricia.