Ian Boucard (Les Républicains) – CONTRE
« Je ne crois pas que ce soit le modèle social qu’on veuille.» Sur la réforme des retraites, Ian Boucard est peut-être le député du nord Franche-Comté qui se détache le plus de son parti (Les Républicains). Député de la 1re circonscription du Territoire de Belfort, il est défavorable au recul de l’âge légal de départ à la retraite. « On fait toujours peser les réformes sur ceux qui travaillent. Aujourd’hui, nous avons besoin d’une véritable réforme sociale.» S’il s’est senti « isolé » dans un premier temps en assumant son point de vue, il note qu’il n’a eu aucun commentaire négatif sur son positionnement au sein de sa famille politique.
Pour lui, la réforme est « hypocrite », « malsaine », « faux-cul ». « Le gouvernement pourrait déjà s’attaquer aux trois millions de chômeurs. À ceux qui sont en capacité de travailler et qui touchent des allocations », tance-t-il. Il pense à ceux qui vont subir la réforme : les personnes ayant commencé tôt à travailler, les personnes avec des carrières hachées. Ceux aussi, qui se retrouvent au chômage après 50 ans et qui « n’arriveront plus à revenir sur le marché du travail ». « C’est eux qui vont payer », regrette-il. Il ne croit pas en l’argument qui expose qu’il faut travailler plus longtemps car la population vit plus longtemps. Il met en perspective l’espérance de vie en bonne santé qui, elle, stagne. Et l’espérance de vie de certains corps de métiers pénibles, réduites à 68 ans.
Le député du Territoire de Belfort affirme qu’il s’opposera à la réforme coûte que coûte, quitte à voter une motion de censure ; qu’elle vienne d’extrême droite ou d’extrême gauche. « Je serais dans les oppositions », expose-t-il. Les prochaines semaines ? Elles feront l’objet de débat « écharpé », mais Ian Boucard souhaite surtout que cela aboutisse à un vote. « Les Français ont besoin de savoir ce que leurs députés ont voté. C’est le sujet essentiel de ce mandat.»
Florian Chauche (La France Insoumise) – CONTRE
Un sujet essentiel de mandat, Florian Chauche, député Nupes/La France Insoumise de la 2nd circonscription du Territoire de Belfort, le pense aussi. Par téléphone, ce 30 janvier, il se prépare à partir à Paris. Le débat sera important et il compte passer le plus de temps possible à l’Assemblée nationale, week-end compris s’il faut, pour ne rien rater des semaines de débats qui s’annoncent. Il se réjouit de l’élection d’un député LFI élu en Charente ce week-end, René Pilato. Un soutien de plus pour voter contre cette réforme. « On va tous être extrêmement mobilisés pour mener le combat.»
Pour lui, l’opposition des différents partis peut faire poids. Et elle est renforcée par le désaccord des Français. Il pense justement que ce désaccord peut ébranler le discours unique souhaité sur cette réforme. « Le climat actuel et l’impopularité de la réforme sèment le doute au sein de la majorité.» Il espère que ce mardi 31 janvier, les Français seront encore plus mobilisés que la première fois pour exprimer leur colère. Il suivra la Nupes pour faire voter une motion référendaire (motion qui, si elle rassemble une majorité de votes, devra être étudiée par le Sénat dans les trente jours, ce qui suspendra l’examen de la réforme, sans pour autant l’annuler). « Nous allons essayer d’utiliser tous les moyens possibles pour contrer la réforme », conclut-il.
Géraldine Grangier et Emeric Salmon (Rassemblement national) – CONTRE
Emeric Salmon, député de la 2e circonscription de la Haute-Saône, est fermement opposé à cette réforme des retraites. Son positionnement : « Une opposition forte. Nous, députés du RN, souhaitons la retraite à 62 ans avec 42 annuités. Et un départ à 60 ans pour les carrières longues avec 40 annuités », expose-t-il.
Il entend les arguments du conseil d’orientation des retraites (COR) qui expose que le régime des retraites deviendra déficitaire dans les prochaines années. « Seulement, les arguments utilisés par le gouvernement ne reprennent que les hypothèses les plus négatives. Aujourd’hui, la retraite est toujours excédentaire alors que le COR disait l’inverse il y a quelques années.» Même si le déficit était « chronique », pour le député, c’est à l’État de prendre en charge cette somme.
« Il y aurait des économies à faire sur d’autres sujets. Mettre plus de jeunes au travail par exemple. Il y a tellement eu de radiations avec pôle emploi qu’on nous fait croire que le chômage est très bas. Seulement, certains passent à travers les radars.» Il est favorable à la motion référendaire, que veulent aussi voter les députés Nupes. « Ensemble, avec toutes les oppositions, je pense que nous pouvons nous opposer efficacement à la réforme ».
Quant à Géraldine Grangier, élue députée dans la 4e circonscription du Doubs, elle a affiché sur ses réseaux sociaux : « Soyez assurés de ma détermination à combattre à l’Assemblée nationale la Réforme des retraites. Aux côtés de Marine Le Pen et des députés du Groupe Rassemblement National nous nous opposerons avec force face cette réforme injuste et brutale ! » Le message est clair, mais elle n’a pas répondu à nos sollicitations.
Nicolas Pacquot (Renaissance) – POUR
En aparté d’une soirée de voeux, Nicolas Pacquot, député de la 3e circonscription du Doubs, du parti de la majorité Renaissance, déchante un peu. Il ne comprend pas le changement de positionnement de certains membres du parti Les Républicains, qui ont pourtant soutenu la réforme du président « lors des élections ». Il voit que les oppositions sont braquées et a du mal à visualiser un débat serein à l’Assemblée. L’examen du projet de loi par les députés doit commencer lundi 6 février.
« Sur le fond, il y a nécessité à réformer », explique le député. Et il y a aussi besoin de supprimer les régimes spéciaux. Pour autant, il affirme que la réforme prendra en compte les différentes pénibilités, les carrières hachées, ou encore la prise en compte des horaires de doublage (un enchaînement d’horaires avec rotation obligatoire matin et soir, sur deux semaines ou plus). « Pour l’avoir vécu, je sais quel impact cela peut avoir. J’ai déposé un amendement en ce sens.» Il souhaite aussi pouvoir intégrer la validation de trimestres supplémentaires pour les engagements bénévoles.
Cette réforme est une réforme des « progrès », selon Nicolas Pacquot. « Elle permettra à 2 millions de retraités de partir avec 1 200 euros brut à la retraite en ayant eu une carrière complète au SMIC.» Pour convaincre, il veut rencontrer un maximum de syndicats. Il a déjà commencé avec des syndicalistes de Stellantis. Il se dit prêt à discuter, et affirme qu’il sera « très vigilant sur les débats » concernant le « fond » de la réforme des retraites.
Quant aux oppositions, il répond net. « Ils ferment les yeux sur les problèmes de financement. Augmenter les cotisations n’est pas la solution alors que nous oeuvrons pour retrouver du pouvoir d’achat. Cela va à contre-sens.» Quant à l’opinion publique de ses électeurs, il ne s’inquiète pas plus que ça. « Pendant mes voeux (dimanche 29 janvier), j’ai senti plus de personnes inquiètes pour l’Ukraine que pour la réforme », tance-t-il.