250 passages par jour aux urgences, dans un service configuré pour accueillir 200 personnes. Et chaque année, on observe une croissance des passages quotidiens de 2 à 3 %. La situation est critique. Et les périodes de saturation « se reproduisent régulièrement », convient Pascal Mathis, directeur général de l’hôpital Nord Franche-Comté, lors d’une conférence de presse organisée ce mardi midi. La saturation des urgences entraîne une sur-occupation des lits dans les services de médecine de l’hôpital, si les patients doivent être hospitalisés. Et parfois, l’attente pour être hospitalisé est longue depuis les urgences, fautes de lits disponibles. Cet afflux de patients ne correspond pas non plus aux moyens de l’établissement, qui rayonne sur un bassin de santé regroupant 350 000 habitants. « Et nous sommes seul sur ce territoire », rappelle le directeur général. Il n’y a pas d’autres replis. C’est particulièrement vrai pendant les périodes de vacances, le week-end ou la nuit.
Pour répondre à cette situation, le directeur général a déclenché le plan Blanc, qui permet de prendre des décisions dans l’urgence sans recourir aux procédures classiques, « afin d’améliorer l’organisation et le fonctionnement de l’établissement ». Le plan Blanc a aussi été activé dans la perspective du prochain week-end prolongé, propice à placer de nouveau l’établissement en difficulté. « Nous avons besoin d’anticiper pour éviter [que se reproduise la situation] du week-end dernier », indique Pascal Mathis. Ce week-end, on a comptabilisé jusqu’à 104 patients en même temps aux urgences de l’hôpital Nord Franche-Comté. Le plan Blanc, contrairement à ses récentes activations pendant la pandémie du covid-19, n’a pas vocation à durer. Pour le moment, il n’y a pas d’annulation des activités programmées. On renforce seulement les effectifs aux urgences, mais les décisions peuvent évoluer en fonction des besoins.
Des raisons multiples
La durée des séjours est anormalement élevée actuellement à l’hôpital, observe le docteur Jean-Baptiste Andreoletti, président de la commission médicale d’établissement. 70 patients atteints du covid-19 sont toujours hospitalisés et on sait que les prises en charge sont plus longues que pour d’autres pathologies. Donc les lits se libèrent moins vite. De l’autre côté, la situation tendue des urgences s’est accentuée depuis la Toussaint. « L’entonnoir se réduit », image-t-il. « Les équipes font le maximum dans des conditions difficiles », insiste également le praticien, pour rendre hommage aux équipes, soumises à rudes épreuves. « On ne peut pas assurer une prise en charge optimale », déplore enfin Jean-Baptiste Andreoletti.
Les raisons de cette situation sont multiples, analyse Pascal Mathis. Selon lui, 15 à 20 % des passages aux urgences n’ont rien à faire aux urgences. Il y a donc un message de sensibilisation à transmettre à la population pour faciliter la régulation des soins ; il faut d’abord appeler le 15 avant de se rendre aux urgences ou solliciter son médecin traitant si c’est une situation non urgente.
Les deux ans et demis de crise sanitaire ont aussi fragilisé les hôpitaux et les équipes. Depuis peu, l’établissement a aussi des difficultés à recruter des infirmières et des aides-soignants. Avant, le turnover était assuré, maintenant, c’est plus délicat. Il y a aussi la concurrence avec la Suisse. « L’hôpital est malade », estime également le docteur Luc Sengler, chef du pôle admission non programmée. Par ailleurs, « il y a une inadéquation entre l’offre proposée et l’afflux de patients », calculé il y a 15 ans. À cela s’ajoute des réalités sociétales, comme le vieillissement de la population.
Pascal Mathis regrette surtout que les deux cliniques ne puissent pas soulager l’hôpital. Il faudrait « que tous les établissements de santé soient en mesure d’accueillir des patients, même par transfert, pendant les temps de crise », estime-t-il. Pour répondre à une problématique territoriale. Les deux établissements ont refusé d’aider. Ils ne sont pas organisés pour, admet-il. Mais c’est un dossier à mettre sur la table : revoir l’organisation hospitalière et repenser les parcours de soins à l’échelle du territoire de santé. Aujourd’hui, le plan Blanc permet de répondre avec des solutions internes à l’hôpital, fort de 3 500 agents. Mais il faut qu’une réflexion plus profonde soit entamée.