Un contrat local de santé devait être approuvé à l’échelle du nord Franche-Comté, porté par le pôle métropolitain. Un imbroglio entre le Grand Belfort et l’agence régional de santé (ARS) a encouragé l’agglomération belfortaine à modifier sa position.
Un contrat local de santé devait être approuvé à l’échelle du nord Franche-Comté, porté par le pôle métropolitain. Un imbroglio entre le Grand Belfort et l’agence régional de santé (ARS) a encouragé l’agglomération belfortaine à modifier sa position. Elle ne le vote plus. Il n’est donc pas totalement métropolitain.
Le nord Franche-Comté, comme le définit le pôle métropolitain, regroupe cinq intercommunalités, soit 196 communes pour plus de 300 000 habitants. Il représente 11 % de la population régionale. La densité de population est de 251 habitants au km2, soit « le territoire le plus dense de la région Bourgogne-Franche-Comté », constate le contrat local de santé, un outil permettant d’impliquer les collectivités locales dans les politiques de santé, conduite par l’agence régionale de santé (ARS). Que dit le diagnostic ? On y dénombre en moyenne, chaque année, 2 615 décès (2009-2013). Sur cette même période, 545 habitants du territoire (361 hommes et 184 femmes) décèdent avant 65 ans. Ces disparitions sont considérées comme des décès prématurés. Cela représente soit 21% de l’ensemble des décès. « 44 % d’entre eux seraient évitables par des actions notamment sur les comportements individuels, dont un recours plus précoce et plus approprié aux dispositifs de soins », indique le contrat local de santé du nord Franche-Comté. Les maladies cardio-vasculaires et les cancers sont les premières causes de cette mortalité prématurée. Le taux standardisé de mortalité (TSM) pour maladie cardio-vasculaires est significativement supérieur au taux régional (21,6 pour 10 000 habitants contre 20,7 à l’échelle de la région). La mortalité attribuée au tabac reste également marquée dans le nord Franche-Comté, avec des taux standardisés de mortalité supérieurs aux taux régional et national.
29 actions, notamment de prévention
Le contrat local de santé vise à intervenir en amont pour prévenir ces risques. « [Ses] objectifs portent notamment sur la réduction des inégalités sociales et territoriales en matière de santé, sur l’amélioration de l’accès des personnes les plus démunies à la prévention et aux soins, sur le renforcement de la coordination, de la qualité, de la sécurité, de la continuité et de la pertinence des prises en charge sanitaires et médico-sociale ainsi que sur l’organisation des parcours de santé, notamment pour les personnes atteintes de maladies chroniques et les personnes en situation de handicap ou en perte d’autonomie », précise le contrat. Il énumère une liste de 29 actions, répondant à cinq axes stratégiques : développer la prévention et la promotion de la santé ; promouvoir un environnement favorable à la santé ; améliorer les parcours de santé ; renforcer l’accès aux soins ; animer et évaluer le CLS.
L’une des actions consiste par exemple à consolider le dépistage organisé des cancers. Une autre cible la lutte contre les risques auditifs et vise à améliorer l’acoustique des bâtiments accueillant des enfants. La fiche action 15 est de son côté un recensement des besoins des Ehpad en télémédecine. La fiche 16 aborde le déploiement du PAERPA (personnes âgées En risque de perte d’autonomie) dans le nord Franche-Comté, un dispositif national dont l’objectif est de maintenir à domicile aussi longtemps que possible les personnes âgées en agissant pour garantir leur autonomie. Le contrat local de santé est un programme de prévention et un programme d’accès aux soins pour les personnes les plus vulnérables. Adapté au nord Franche-Comté, « le contrat local de santé offre également la possibilité aux [collectivités] qui le souhaitent de mettre en place des déclinaisons territoriales afin qu’ils puissent développer des projets spécifiques aux problématiques de leur territoire », précise la délibération soumise au vote, à l’occasion du dernier comité métropolitain.
Peu d’enthousiasme politique
Malgré ces principes, les élus du pôle métropolitain, réunis en comité le 12 juillet, ont regretté de nombreuses choses. Fernand Burkhalter, le président de la communauté de communes du Pays d’Héricourt, estime que « c’est une coquille vide ». « Il y a beaucoup de réunions et peu d’impacts. » Il estime que les collectivités doivent s’intéresser aux maisons de santé et à l’accueil des spécialistes. « L’ARS doit lever les freins aux implantations », estime-t-il. Ce propos faisait suite aux remarques formulées par Martial Bourquin. Il remarquait la disparition des médecins généralistes. « On a vu que les zones où il y a beaucoup de médecins, cela coûte cher à la sécurité sociale, car on consomme beaucoup. Mais là où il n’y en a pas du tout, cela coûte très cher également, car il n’y a pas de prévention », regrette-t-il. Il profite de ce sujet pour regretter le manque de lits à l’hôpital Nord-Franche-Comté et l’engorgement des urgences. Claude Perrot, vice-président à Pays de Montbéliard Agglomération en charge de la culture, glisse « que rien n’interdit les collectivités de prendre des initiatives », en dehors de ce contrat local de santé.
Double peine ?
Le contrat a été approuvé par le pôle métropolitain. Quatre personnes ont voté contre et quatre se sont abstenues. Le Grand Belfort a annoncé qu’il prendrait prochainement une délibération pour annuler son vote en faveur de ce contrat, basé à l’origine « sur la parole de l’État », qui garantissait le maintien du registre des tumeurs dans le département (lire par ailleurs). Le contrat local de santé Nord-Franche-Comté ne sera donc pas métropolitain et ne sera pas déployé dans les limites du Grand Belfort. Certains regrettent que l’on perde donc le registre des tumeurs (lire par ailleurs), mais aussi la capacité de prévention envisagée par le contrat local de santé… Double peine !
Ironie politique… Le rapport suivant le contrat local de santé a été approuvé à l’unanimité. On votait le financement du poste d’animation territoriale du contrat local de santé. En clair, on ne vote pas le contrat, mais on vote le financement de l’agent chargé d’animer sa mise en œuvre sur l’ensemble du pôle métropolitain ! Sacrée cohérence. Le plan local de santé était l’un des premiers dossiers d’envergure pour le territoire nord franc-comtois. Avec un projet commun, défini à partir du pôle métropolitain. Il se fera sans le Grand Belfort.
Fin du registre des tumeurs à Belfort
Il n’y a pas de registre national du cancer en France. Il y a des registres départementaux, notamment dans le Doubs, créé en 1976, l’un des plus anciens. En France, il existe aujourd’hui 31 registres dont 28 intègrent le partenariat financier et scientifique. Certains registrent abordent tous les cancers, d’autres sont spécialisés. En 2006, à la suite d’observations « d’une sur-incidence des cancers du poumon chez la femme du Territoire de Belfort », l’ARS finance l’extension d’un registre au Territoire de Belfort. Avec le Doubs, ce registre couvrait une population de 700 000 habitants. L’ARS a décidé d’arrêter ce financement. Aucune solution de financement pérenne ne s’est présentée pour le poursuivre. Il est donc arrêté. Vent debout contre cette décision, Damien Meslot a décidé, en retour, de ne pas approuver le plan local de santé du nord Franche-Comté. Et de couper « toutes collaborations avec l’ARS ». « On se moque de nous, dénonce-t-il. Pour une économie de bout de chandelle. On nous empêche de mieux étudier les cancers. » Dans sa réponse, l’ARS précise que « le fait de ne pas avoir de couverture nationale exhaustive par des registres n’empêche pas de disposer des estimations scientifiquement valides à un niveau infranational dès lors que les registres existants couvrent 20 % de la population ».