Le métavers. Le mot impressionne, mais il est possible de vulgariser. Il s’agit d’un monde virtuel immersif connecté. Parmi beaucoup d’exemples, un jeu vidéo connecté par plusieurs utilisateurs est un métavers. Un univers comme celui du film Matrix, en est un autre type. Quel rapport avec la musique ? De nombreux artistes s’emparent de ces mondes virtuels connectés pour faire connaître leur musique et y organiser des concerts, ce qui peut aussi générer des ressources. La chanteuse Aya Nakamura, par exemple, a enregistré un concert sur le jeu vidéo Fortnite qui a été diffusé ce jeudi 6 octobre. En lançant une partie et avec un code donné, les joueurs sont directement connectés les uns aux autres et vivent le concert par le biais de leur jeu vidéo. Si on ne connaît pas les recettes générées par ce concert, Travis Scott, rappeur américain, a fait le même type de concert sur Fortnite en 2020, ameutant 10 millions de personnes et collectant 20 millions d’euros rien qu’avec les achats faits sur le jeu vidéo lors du concert. Aurélie Leduc, productrice de contenus en réalité virtuelle et augmentée pour le studio Atlas V, voit cette manière de faire comme l’une des facettes incontournables de l’avenir de la musique.
Que fait votre studio, Atlas V ?
C’est une société de production d’expériences immersives. Nous y produisons des expériences de réalité virtuelle, de réalité augmentée et un peu de jeux vidéos. Ce sont, en fait, des technologies immersives qui permettent de raconter des histoires, de créer des expériences dans ces nouveaux mondes virtuels.
Comment sont apparues ces expériences immersives ?
C’est une pratique qui est apparue pendant la pandémie. Les gens ont été amenés à rester chez eux et ont souhaité continuer à avoir des expériences culturelles pendant le Covid. Depuis, c’est une habitude qui est restée. On le voit d’ailleurs à la fréquentation des salles en baisse. Des questions se sont donc posées à ce moment-là : comment raconter des histoires avec ces nouvelles technologies en créant des groupes immersifs ?
Pourquoi la musique et les mondes immersifs se rencontrent ?
Les mondes immersifs permettent de créer des concerts virtuels. Cette année, nous en avons créé deux avec des formats différents : un format sur un monde virtuel qui se nomme Horizon, créé par Meta (Facebook).Avec l’artiste Timothé Joly.
Et un concert interactif sur Twitch avec l’artiste Owlle, que nous avons fait en collaboration avec Arte Concert. Dans ces concerts, nous avons expérimenté la notion de motion capture, en plaçant des capteurs sur les artistes qui ont permis de reproduire les mouvements sur des avatars 3D. Mais ce n’était pas fait en live. La plupart du temps, cela est fait avant, en studio.
Quel est le prix de ce type de concert ?
Ces technologies sont encore très chères. 200 000 euros pour un concert comme celui de Owlle. Mais notre engagement est de rendre ces technologies accessibles au plus d’artistes possibles et que ça ne soit pas fait que pour un petit groupe d’artistes plus connus avec des moyens importants.
Pourquoi ces univers plaisent tellement aux gens ?
Cela plaît aux gens car l’univers virtuel dans lequel ils sont transportés est complètement différent de leur salon ou d’une salle de concerts. Cela leur permet d’avoir des expériences visuelles intéressantes. Ils vont pouvoir voler, plonger avec les artistes. Il y a aussi tout le côté interactif qui donne plus de place aux spectateurs : ils vont pouvoir se déplacer, interagir avec l’artiste, faire en sorte que leurs actions déclenchent des effets visuels. Ce qui change et plaît finalement, c’est une implication et un engagement différent que dans une salle de concerts. Et l’idée n’est pas de reproduire un concert en live, mais de proposer quelque chose de différent.
Beaucoup reprochent à ces univers leur approche visuelle enfantine. Comment l’explique-t-on ?
Le rendu graphique des mondes virtuels est lié à des questions d’interface, de serveurs, de puissance limitée. Qui font partie des discussions sur les enjeux environnementaux : plus les serveurs sont puissants, plus c’est polluant. Plus l’on souhaite un univers graphique poussé, plus il faut des puissances de calcul et des serveurs importants qui sont capables de renvoyer des informations à plusieurs personnes au même moment. D’où le fait que cela soit encore un peu limité, la technologie n’est pas encore tout à fait mature. Et il faut encore travailler sur les problématiques environnementales.
Quel est le but de ces conférences avec des jeunes artistes émergents ?
Nous travaillons dans un secteur de niche, la réalité immersive. Et aujourd’hui, 85% des gens n’ont jamais mis leur tête dans un casque de réalité virtuelle. Nous sommes sur des nouvelles pratiques que certains ont pu entendre. Mais dans l’ensemble, les gens n’y connaissent pas grand-chose. L’idée est de présenter les activités, les outils. Leur donner une vision globale de ce qui est possible et la manière dont ils peuvent s’en emparer. Pour créer des choses différentes qui s’intègrent dans leur projet artistique.