Une structure architecturale métallique, style Eiffel. Des briques rouges. Un environnement qui flaire l’âme industrielle. Au cœur de Sochaux, berceau de Peugeot, le Mattern Lab – un hommage à Ernest Mattern, le penseur de l’usine sochalienne dans les années 1920 – déploie son imposante façade. Le site est ouvert sur l’usine Stellantis et ouvert sur la ville. Comme un point de rencontres qu’il doit être, au service de l’innovation et de la transformation industrielle d’un territoire, qui doit passer à l’ère numérique, en intégrant datas, intelligence artificielle ou encore réalité augmentée…
« Nous avons commencé à imaginer ce lieu en 2017 », se souvient Jean-Charles Lefebvre, le président du Mattern Lab, notamment avec Ghislain Montavon, directeur de l’université de technologie de Belfort-Montbéliard (UTBM) et Kévin Appointaire, qui travaille chez l’équipementier automobile d’Anteuil, Delfinguen. Un projet façonné dans le cadre de la dynamique insufflé par le programma Territoire d’innovation, dont le nord Franche-Comté a été lauréat, lançant de nombreux projets, notamment autour de l’hydrogène (lire ici). La crise sanitaire et la crise des semi-conducteurs a forcément ralenti le lancement de ce projet.
Depuis près d’un an, le site se lance pas à pas (nos articles). Il a déjà accueilli des manifestations, accueillant des expositions et même un festival centré sur les innovations de demain, le festival Inouih, qui a rassemblé près de 1 500 personnes. Les organisateurs n’en reviennent toujours pas de ce succès. Un succès qui témoigne de l’enthousiasme de la population pour cette industrie qui se transforme. « L’industrie de cette région ne rêvait plus », convient Jean-Charles Lefebvre. Le Mattern lab doit l’aider à retrouver les étoiles.
Chercheurs, start-ups, PME...
Aujourd’hui, le Mattern lab continue de s’étoffer. Il accueille une ligne de production dernier cri, dédiée à la formation des étudiants de la fédération de l’union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM). Les étudiants pourront y manipuler robots et autres cobots pour se familiariser aux outils qu’ils auront dans les usines. Avec une particularité : ce que fabriquent les étudiants la journée est démontée la nuit par les robots, afin de pas gaspiller. L’institut de recherches Femto-St (Franche-Comté Electronique Mécanique Thermique et Optique – Sciences et Technologies) y localisera aussi des chercheurs.
Une start-up est déjà installée, avant que d’autres ne la rejoignent. Phigi travaille sur de la programmation de la matière. Un travail sur ordinateur entrainera la modélisation directe d’une maquette, constituées de billes connectées. Les modifications apportés sur le dessin prennent vie immédiatement. Et surtout, les manipulations faites sur différents ordinateurs, dans différents sites, peuvent avoir une reproduction directe à un endroit. Deca BFC, l’incubateur de la Région Bourgogne-Franche-Comté sera présent sur place pour aider les start-ups. Si les projets prennent, les jeunes pousses seront accompagnées par Le Village by CA, la structure du Crédit agricole dédiée à l’accélération des projets.
Autre pilier, les entreprises, qui doivent se saisir de ce lieu, pour penser l’avenir de leur activité, afin de se tourner vers l’industrie 4.0, l’ère du numérique, de la data, de la réalité augmentée… un train qu’il ne faut pas rater, alors que les transformations, si ce n’est les révolutions, se font à une vitesse effrénée.
Un Fab lab dès février au Mattern Lab
Le Matern lab est un lieu pour se rencontrer, échanger, débattre, innover et tester avec, qui plus est, un accès privilégié à un environnement industriel de premier plan, l’usine Stellantis de Sochaux, qui pourrait devenir un terrain d’essais. Et dans cet espace de 5 000 m2, tout est pensé pour susciter les idées : les salles de cours adoptent des pédagogies innovantes ; des outils d’animation de l’innovation facilitent les réflexions ; des salariés du Mattern Lab accompagnent les curieux et animent la communauté. Le Mattern lab doit permettre aux entreprises « de chasser en meute », estime le président, finalement, Jean-Charles Lefebvre. On pourrait même imaginer des investissements collectifs pour ces entreprises qui voudraient tester des technologies, à l’image des coopératives agricoles, qui mutualisent l’achat de matériel. Des projets sont aussi sur la table avec Ideis, pour l’insertion professionnelle. Une manière de dépoussiérer l’image de l’industrie et de susciter des vocations.
Et dès le mois de février, le Mattern lab disposera d’un Fab lab, ouvert aux entreprises et aux particuliers. « Nous mettons à disposition des machines de prototypage », indique Pierre Laipe, l’animateur de ce lieu. À disposition, des imprimantes 3D, des postes à souder, une fraiseuse à commande numérique, une découpe laser ; et l’utilisation des machines est à un coût modéré. Autant de machines qui permettent de façonner, sur différentes matières, son idée. Pierre Laipe accompagnera les inventeurs dans la prise en main des machines, dans une démarche de faire soi-même.
Ce jeudi soir, une première soirée de lancement est organisée, dès 17 h. « Nous allons expliquer ce qu’est l’industrie 4.0 », détaille notamment Christian Arguelles, l’heureux directeur du lieu. Une soixantaine d’entreprises compte y participer. D’autres soirées vont suivre. Car l’enjeu n’est pas ce qu’il y a aujourd’hui. Mais « tout ce qui va se faire après », replace le président du Mattern Lab, Jean-Charles Lefebvre. Un nouveau monde à créer.