Il y a 20 ans, on parlait d’automatisation et de numérisation, dans les usines. Aujourd’hui, on évoque l’intelligence artificielle ou la fabrication additive, plus communément appelée impression 3D. « Les entreprises de 2025 ne sont pas les même qu’en 2005 », résume joliment Ludovic Party, directeur filière et excellence opérationnelle au pôle Véhicule du futur.
Le pôle Véhicule du futur a justement été créé en 2005 pour accompagner la filière automobile, dans son excellence industrielle, et les filières des mobilités terrestres motorisées, dans ses dynamiques d’innovation. Aujourd’hui, la structure rayonne sur la Bourgogne-Franche-Comté et le Grand Est. Elle compte près de 500 adhérents, autour de métiers aussi différents que la plasturgie, le traitement de surface, l’usinage, le numérique, la motorisation ou encore la métallurgie. Elle met en lien des acteurs industriels, mais pas que : la recherche et le milieu académique sont associés pour créer du « lien », dixit Thierry Tournier, le président du pôle depuis 2023, afin de faire émerger des projets innovants.
Surtout, le pôle est ancré dans ses territoires. « C’est un acteur incontournable de l’innovation, un partenaire de la transformation de la filière », écrit-il, dans son dossier de presse. Le seul interlocuteur à cette échelle, dans les deux régions. Son but : « Créer un écosystème pour avoir des gens qui créent des projets ensemble », résume Bruno Grandjean, le directeur général de la structure. « Nous accompagnons les entreprises en fonction de leurs besoins qui évoluent tout le temps », complète Ludovic Party. Certaines cherchent des gains de productivité, d’autres à améliorer leur compétitivité et les derniers à entamer une diversification. Des entreprises regardent vers les secteurs de l’aéronautique ou de la défense (lire notre article), d’autres vers le médical, voire avec l’industrie des équipements agricoles.
Filière « chahutée »
C’est que la filière automobile vit une transformation d’envergure. « La période est très chahutée », euphémise Thierry Tournier. L’électrification à marche forcée de l’automobile bouscule les acteurs, déjà fragilisés par une concurrence internationale féroce et un contexte géopolitique extrêmement instable. À cela s’ajoute des volumes en baisse. Un terrible effet ciseau. Pour autant, le pôle ne verse pas dans le fatalisme et croit toujours au potentiel industriel de l’automobile, notamment dans la région. « Le sort de l’industrie automobile n’est pas scellé », estime Bruno Grandjean. De compléter : « Il faut regarder loin et ne pas que se focaliser sur le marché européen. »
Le pôle maintient sa trajectoire, pour aider la filière à passer le cap et à continuer d’écrire l’avenir. « Cet accompagnement est clé », assure Thierry Tournier. Il met en place des groupes de travail, organise des évènements, comme le forum hydrogène (lire nos articles), propose des missions à l’étranger « pour qu’il y ait plus de projets qui émergent », explique Bruno Jamet, directeur innovation du pôle Véhicule du futur. Ce rôle d’animateur de filière est complété d’un travail de veille essentiel, de benchmark « pour rester connecter à l’actualité et éclaire l’avenir », ajoute-t-il.
Un peu d'histoire
- Juillet 2005 : le pôle Véhicule du futur est labellisé pôle de compétitivité ; il prépare, pour 2026, sa 6e labellisation
- Janvier 2006 : Première signature de contrat de performance, avec Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur
- 2008 : 200 adhérents
- 2018 : extension du Pôle véhicule du futur à la Bourgogne-Franche-Comté et au Grand Est
- 2020 : création des clubs hydrogène
- 2024 : 494 adhérents, 630 projets labellisés, 300 projets financés depuis la création et 22 salariés. Ces projets ont permis la création ou le maintien de 6 550 emplois.
Le pôle véhicule du futur ne s’arrête pas, par contre, aux réglementations européennes, qui n’ouvrent pas encore plusieurs solutions. Il travaille par exemple sur des projets liés aux moteurs à combustion interne ayant recours à de l’hydrogène ou des e-carburants. L’innovation ne se mesure pas du jour au lendemain. C’est un long processus insiste Bruno Jamet.
Les collectivités ont maintenu leur soutien au pôle, assure le président, malgré une situation budgétaire compliquées. « Les collectivités sont très au fait de l’importance de la filière économique », indique Thierry Tournier ; et l’action du pôle fait partie du contrat de plan État-Région. « Notre job est d’accompagner les transformations du tissu industriel », complète encore Thierry Tournier, avant de conclure : « Il faut souvent travailler longtemps pour aller vite. » C’est ce que fait le pôle Véhicule du futur depuis 20 ans, au nom de l’innovation des mobilités.
3 exemples de projets labellisés
- Un simulateur de conduite de train (2012), en lien notamment avec Alstom et l’université de technologie de Belfort-Montbéliard (UTBM), afin de valider les postes de conduite des locomotives Alstom et de former les conducteurs ; le simulateur est basé sur un pupitre de conduite réel
- Mobypost (2012): expérimentation, avec le groupe La Poste, d’un système couplant la fourniture d’hydrogène obtenue grâce à des panneaux photovoltaïques, utilisé ensuite dans des véhicules électriques dotés d’une pile à combustible, pour distribuer le courrier. Le projet était mis en place à la plateforme courrier d’Audincourt.
- La semi-remorque hydrogène Road (2019): le projet était porté par le FC Lab et le pôle Véhicule du futur, impliquant H2SYS et le fabricant de remorques frigorifiées Cherreau. Le groupe froid de la remorque était alimenté par un groupe électrogène dont l’énergie électrique était produite à partir d’hydrogène
