Loéva Claverie
À première vue, la zone ouverte située au 6 rue Bourdieu à Lure n’a rien de particulièrement attrayant. Un parking au centre, une parcelle herbeuse à gauche et un terrain de rugby avec un petit local dans le fond. C’est pourtant ce terrain qui a été choisi pour construire un centre éducatif fermé (CEF), qui accueillera des jeunes de 15 à 18 ans, « ancrés dans la délinquance ». Juste en face des locaux de la brigade motorisée de la gendarmerie nationale.
La construction de ce centre s’inscrit dans un programme mis en place par le garde des Sceaux de l’époque, Éric Dupont-Moretti (2020-2024), pour créer vingt nouveaux CEF en France. Le territoire en compte déjà 56. Lors de la cérémonie de dévoilement du panneau annonciateur du projet, qui se déroulait sur le terrain lundi 17 juin, Éric Houlley, maire de Lure s’est réjoui de l’arrivée de ce centre. La ville de Lure avait été marquée par les fermetures du tribunal judiciaire et de la maison d’arrêt qui s’y trouvaient, a-t-il rappelé.
Dans le futur CEF qui accueillera douze jeunes, garçons et filles, pour une durée de six à douze mois, une trentaine d’emplois « viendront compenser le départ des personnels pénitentiaires douloureusement ressentis sur nos territoires », a déclaré Éric Houlley.
Le CEF – dont le nom n’a pas encore été décidé – sera situé à l’entrée ouest de la ville, une zone que la mairie souhaite « redynamiser avec la communauté de communes ». Éric Houlley a rappelé l’objectif de ces structures des centres éducatifs fermés, à savoir « de répondre à des formes graves de délinquance des mineurs en combinant sanctions en éducation. Ces établissements sont nécessaires pour extraire ces jeunes de leur univers déviant, réduire les risques de récidives et protéger la société ».
Dix-huit mois de travaux
Christophe Thiery, architecte de l’Atelier du Haut Verger qui a réalisé le projet, a expliqué que le CEF s’intégrera « le plus gracieusement possible » dans le décor. Sur la parcelle de 5 000 m2, 1 000 m2 seront consacrés au bâtiment du CEF, 1 400 m2 au parvis et 2 500 m2 aux aménagements extérieurs tels que jardin et potager. D’un montant de quatre millions d’euros, les plans incluent aussi une maison familiale qui servira à accueillir les familles lors des visites à leur enfant, les jeunes pouvant venir de tout le territoire.
Selon Frédéric Parra, directeur territorial de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), entre 800 et 900 jeunes sont actuellement suivis par les services de la PJJ sur l’ensemble de la Franche-Comté pour des faits de délinquance, dont cinq à dix placés en CEF. « Il y a des besoins aujourd’hui pour des établissements complémentaires. Mais on ne peut pas dire aujourd’hui que les situations de délinquance augmentent. » Les CEF s’affichent comme une alternative à la prison, avec l’objectif d’éduquer et de réinsérer. « Derrière chaque mineur délinquant, il y a un enfant en souffrance », a pointé Romain Royet, préfet de la Haute-Saône.
À Lure, de nombreux partenariats seront menés avec les associations et les entreprises pour développer des projets « visant à favoriser l’insertion des mineurs et prévenir la réitération des comportements délinquants ». Animateurs sportifs, associations spécialisées dans la réinsertion, professionnels de santé, partenaires institutionnels (pompiers, policiers) interviendront dans l’établissement pour des ateliers de prévention, des activités socio-culturelles ou encore des cours de secourisme, par exemple. Des ateliers auront également lieu avec des acteurs économiques locaux ; allant du jardinage à la couture et à la maroquinerie, de la mécanique auto à l’école de rugby.
Les consultations publiques pour le CEF de Lure seront lancées en fin d’année. Le début des travaux est prévu à l’été 2026 avec, au terme des dix-huit mois de chantier envisagés, une livraison fin 2027. Il viendra s’ajouter au CEF déjà existant et en cours de rénovation à Châtillon-sur-Seine (Côte-d’Or), et à un autre CEF, actuellement en cours de réflexion, à Varennes-le-Grand (Saône-et-Loire).
