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C’est Paul Bubba, ouvrier agricole de 26 ans qui a repéré l’animal alors qu’il travaillait dans les champs à Charmoille, en Haute-Saône, la semaine dernière: “J’étais en train de faucher, et quand on fauche, les cigognes viennent nous voir, elles suivent les engins et ramassent les insectes”, a-t-il raconté à l’AFP. “L’une est arrivée avec une canette de coca dans le bec”, a poursuivi le jeune homme qui a tenté de la secourir sans succès. “J’ai essayé de la choper pour essayer de lui enlever mais je n’ai jamais réussi, c’était un peu frustrant…” a-t-il raconté, pris de pitié pour le “pauvre animal” incapable de boire ou de manger.
L’agriculteur a pris en photo l’oiseau puis a posté les images sur le réseau social Tiktok pour “montrer la connerie humaine”: “ça m’a énervé parce que j’en ramasse tout le temps”, a-t-il dit à propos des canettes, bidons et déchets plastiques répandus dans les champs. “On a déjà eu une vache qui a avalé un sac plastique et qui est morte. Et des collègues ont eu le cas de vaches qui ont mangé des bouts de canettes fauchées, ça leur a percé l’estomac.” Ses images de la cigogne ont connu un succès inattendu, le sort de l’échassier suscitant l’émoi du public.
Habitants en "veille"
Après avoir été vu la première fois lundi 12 juin par l’agriculteur, l’oiseau a été aperçu quelques jours plus tard à “5-10 kilomètres” de là, à Faverney, puis s’est volatilisé, déclenchant un branle-bas de combat pour le trouver et le libérer de son entrave “Des bénévoles se relaient, en plus des agriculteurs et des habitants qui font une veille”, a raconté à l’AFP mardi Samuel Maas, ornithologue à la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux) de BourgogneFranche-Comté.
Lundi, le directeur général de la LPO, Matthieu Orphelin, a interpellé Coca-Cola sur Twitter: “La cigogne est une espèce protégée et vous pouvez/devez être exemplaire sur le cas présent”. Sollicitée par l’AFP, l’entreprise a fait part de sa “tristesse” face à la situation et se dit favorable “à l’introduction d’un système de consigne bien conçu pour les canettes et les bouteilles, ce qui encouragerait les gens à les trier en vue de leur recyclage plutôt qu’à les jeter”.
Piégés par le plastique
Finalement, l’histoire a connu un dénouement heureux: le volatile a été aperçu à La Truchère en Saône-et-Loire et secouru mardi après-midi par les pompiers de Tournus. Ils ont expliqué à l’AFP avoir pu attraper l’oiseau “assez facilement” car il était “peut-être un petit peu affaibli” et l’ont remis au Centre Athénas qui soigne et relâche des animaux sauvages dans la nature.
Mais au-delà du cas très symbolique de cette cigogne, Samuel Maas, de la LPO de Bourgogne-Franche-Comté, dénonce le problème “récurrent” de la pollution: “On retrouve des plastiques assez régulièrement dans les nids avec parfois des oiseaux qui se retrouvent piégés”, les pattes enchevêtrées dans des fils de plastiques utilisés pour confectionner leur nids. Citant l’exemple de la pie-grièche grise, il explique que la région comptait 300 couples dans les années 1990 mais “plus que dix aujourd’hui, et une fois par an on retrouve un couple piégé par du plastique”.
Après la pandémie de Covid-19, les ornithologues ont aussi observé “beaucoup de nids de rapaces confectionnés avec des masques chirurgicaux”. La LPO locale a dit espérer “que cette triste aventure permettra de sensibiliser un maximum de personne sur l’impact des déchets jetés en pleine nature. Causes de blessures, voire de mortalité, ces derniers représentent un impact fort pour la biodiversité. À nous d’être plus responsables!”